Pas de Mac Donald en Tunisie; je garde mon casse-croûte et mon lablabi, merci !!
Préambule 1: un casse-croûte tunisien est un repas complet. Il prend la forme d’un petit pain ou la moitié d’une baguette ouverte à moitié et dont l’intérieur est d’abord oint d’huile d’olive puis recouvert d’une fine couche d’harissa, et dans lequel on dépose successivement de la salade méchouia, cadune grillade de piments, tomates, oignons et ail, un peu de salade tunisienne constituée aussi de tomates fraîches, piments verts, oignons et concombres coupés avec de la menthe fraîche en tout petits dés, quelques cubes de pommes de terre cuite à l’eau, des câpres, un huitième d’oeuf cuit, un bout de citron confit, et le tout abondamment recouvert de thon tunisien avec un filet huile d’olive.Précision importante: le thon tunisien est une variété de thon rouge extrêmement savoureuse et différente du thon blanc courant dans le monde entier.
Préambule 2 : un lablabi est un plat populaire tunisien qui constitue un repas. Il est consommé surtout en hiver, aussi bien le matin qu’au déjeuner, au dîner ou encore tard dans la soirée. Dans un grand bol de terre-cuite (de couleur jaune généralement avec des décorations vertes) on coupe le pain de la veille en petits morceaux; ensuite on les baigne avec une soupe de pois-chiches. Les pois-chiches sont cuits dans de l’eau et du sel durant de longues heures jusqu’à ce qu’ils deviennent tendres. Donc, les morceaux de pain de la veille sont mouillés avec le liquide, on y dépose ensuite une grosse louche de pois-chiches, on assaisonne avec du cumin (efficace contre l’aérophagie cad la formation de gaz dans l’estomac), une bonne cuillère d’harissa et de l’huile d’olive. On y ajoute selon les goûts une tranche de citron pressé, des câpres, un oeuf mi-cuit. Avant de manger, on prendra soin de bien mélanger le tout, et on accompagne ce plat généralement de variantes et d’un Boga cidre.
Pourquoi parlons-nous de casse-croûte et de lablabi ?
La semaine dernière, une information de la plus haute importance est passée presque inaperçue. Leaders. Com; un site particulièrement spécialisé dans les courbettes et le cirage de bottes à la mode ancienne, notamment quand ce sont celles des dirigeants, a publié en date du 9/6/2011 un article qui semble très ordinaire: “Ce que les opérateurs tuniso-américains ont demandé à Caïd Essebsi.” Ces gentils loubards n’ont rien demandé au peuple tunisien, ils s’adressent au Maitre. Mais que lui ont-ils donc demandé ?Lisons:
Il ne faut pas être un génie pour voir comment les opérateurstuniso-américains (sic) font avaler la couleuvre à Caïd Essebsi. Un groupe de volontaires, pour calmer les ardeurs révolutionnaires, puis le Big Bang: “lever l’interdiction sur la franchise des marques internationales” , c’est-à-dire en tunisien: ouvrir la Tunisie à tous les Mac Donald’s, Les Kentucky Fried Chicken, et toute cette bouffe infecte typique du régime alimentaire américain, vendue à coup de pub et de communication. Vous pouvez imaginer combien de businessmen tunisiens n’arrivent plus à dormir depuis, caressant le rêve de ces fast-foods envahissant toute laTunisie. Oh, soyons tranquilles, ils n’oublieront pas cette fois les régions internes, défavorisées, enclavées etc.
Il y a quelques années, le site de Leaders.com avait publié un article encensant un gros opérateur français spécialisé en quincaillerie qui s’installait chez nous. J’ai envoyé au site quelques lignes expliquant qu’il n’y avait pas de quoi se réjouir. L’opérateur créera quelques postes de travail, mais il en abolira beaucoup plus, parce que toutes les petites quincailleries de quartier et boutiques similaires devront fermer. Tout comme les épiciers et les supérettes ont tous fermé là où les géants français de la distribution se sont installés. Et que tout compte fait, c’est un marché de dupes de notre point de vue. Comme vous vous en doutez, mon commentaire n’a jamais été publié; depuis, je n’ai plus communiqué avec ce site, vitrine du capital sauvage et se vendant en jouant sur le gonflage des ego des personnes qu’ils appellent leaders. Évidemment, avant le 14 janvier, les Trabelsi, Matri, Chiboub, et autres Jilani en constituaient la littérature. Bref.
Tunisiennes et Tunisiens, nous avons un régime alimentaire (un peu gras j’en conviens) mais qui est l’un des meilleurs du monde. Nos enfants mangent du couscous, des pâtes, des légumes, des fruits, du poisson… Si la bouffe infecte américaine débarque chez nous, nous aurons l’obésité, lecholestérol, les problèmes cardio-vasculaires; avec tout le résultat au niveau de la production intellectuelle…
Le premier problème de santé aux États-Unis est l’obésité. Ils sont gonflés et malades, ceux qui s’en sortent doivent faire 20 km par jour de footing.
Notre cuisine, casse-croûte tunisien, lablabi, osbane, brik, mermez etc compris, notre cuisine nationale fait partie intégrante de notre culture et de notre patrimoine. Revendiquons-les, parlons de l’exception culturelle tunisienne, et refusons la levée d’interdiction sur les franchises des marques internationales.
Ce n’est pas parce que quatre requins affamés veulent s’enrichir que nous devons sacrifier la santé de nos enfants, et enterrer notre patrimoine culturel, tout en envoyant au chômage les milliers de petits restos et autres humblesgargotes qui vivent et font vivre leurs familles de ces petites spécialités tunisiennes qu’ils nous préparent quotidiennement.
De grâce, prenons position pour notre patrimoine et pour notre économie. Et surtout, ne faisons aucune confiance aux grands groupes alimentaires; ils n’ont aucun scrupule, et mentent pour vendre leur bouffe infecte, y compris les OGM. En voici une petite preuve publiée en Mars 2010 par Le Monde Diplomatique sous le titre “L’Inde résiste à la séduction de l’agro-alimentaire américain, rédigé par MiraKamdar.” :