L'Italie lance le recyclage des couches-culottes | Les Echos

L'Italie lance le recyclage des couches-culottes | Les Echos

C'est une première mondiale qui a reçu en avril le prix européen de l'économie circulaire: les couches-culottes vont désormais pouvoir refaire de l'usage.A Trévise, près de Venise, en Italie, a été inaugurée ce mercredi la première usine capable de les recycler à échelle industrielle.

Les couches et serviettes hygiéniques sont des produits courants mais normalement voués à l'incinération ou à la décharge car trop complexes à recycler vu leurs multiples strates de cellulose, de polymères (pour l'absorption), de plastique et le fait qu'ils sont souillés de matières organiques une fois usagés.

100 brevets déposés

Le géant Procter & Gamble (Pampers, Tampax…) s'est associé au fabricant italien de produits d'hygiène Angelini pour relever le défi. Les recherches lancées par leur coentreprise italienne à 50-50, Fater, depuis 2008, ont abouti à une technologie «qui a fait l'objet de 100 brevets», souligne le responsable du développement de Fater, Marcello Somma.

Après une période de test depuis 2015 sur le site de gestion de déchets de Contarina, l'établissement public rassemblant 50 municipalités de Vénétie dont Trévise, la troisième génération de machines entre en production. Contarina effectue la collecte sélective pour alimenter la ligne de recyclage de Fater, dimensionnée pour un million d'habitants et 10.000 tonnes de couches par an.

Des matières qui coûtent cher

Le montant de l'investissement n'est pas révélé mais «le retour sur investissement est de trois à quatre ans, sans subvention», assure Marcello Somma. La revente de la cellulose, du plastique et des polymères superabsorbants récupérés des couches assure l'équilibre financier car «les couches utilisent des matières de grande qualité ayant de la valeur. Une tonne de polymère superabsorbant vierge vaut 2.000euros», poursuit Marcello Somma.Une tonne de couches usagées permet de récupérer 350kg de matières revendables dont 50% de plastique (polyéthylène et polypropylène), 25% de cellulose et 25% de polymères superabsorbants. Le reste (matières organiques et eau) part à la station d'épuration.

L'Italie lance le recyclage des couches-culottes | Les Echos

Sur le site de Contarina, pas de contact humain avec les couches. La benne les déverse sur un tapis roulant les emmenant directement à un autoclave où la vapeur les ouvre, les nettoie de tout ce qui est organique et les stérilise. La matière récupérable est broyée puis déshydratée avant que les trois matières soient séparées. Outre les usages classiques de la cellulose, le plastique est réemployé pour fabriquer divers objets (cintres plastiques, emballages souples,etc.) et le polymère superabsorbant devient des revêtements utilisés en agriculture pour la rétention d'eau en surface.

Quid d'un réemploi de ces trois matières pour refaire des couches? «On y travaille», déclare Marcello Somma. A ce stade, le nom des industriels achetant les matières recyclées est confidentiel mais ni Procter & Gamble ni Angelini n'en font partie, pour leur propre production. «Ils étudient l'option», assure Giovanni Fabbri, le directeur général de Fater.

Un projet aux Pays-Bas

Ce n'est donc pas encore de l'économie circulaire mais en tout cas la technologie de Fater, qui en reste propriétaire, a de l'avenir car «en Italie, 600 municipalités pratiquent déjà la collecte sélective des couches, ce qui représente 10millions de tonnes de gisement», précise Giovanni Fabbri. Pour autant, ce n'est pas en Italie que se situe le prochain projet de Fater, mais aux Pays-Bas. «L'objectif est d'y commencer la construction d'une installation à la fin de 2018, sachant qu'il s'agira d'une technologie différente de celle mise en oeuvre en Vénétie, explique Giovanni Fabbri.En Hollande, nous produirons en plus des produits chimiques commercialisables, par ajout d'une phase supplémentaire au process de recyclage». Pas de détails là encore, Fater redoutant les fuites. «Notre objectif est d'implanter ce type d'installation un peu partout en Europe, notre procédé doit rester confidentiel», justifie Marcello Somma.

Une chose est sûre, «notre installation de recyclage n'a pas besoin de subventions, elle repose uniquement sur un accord avec les collectivités locales pour mettre en place la collecte sélective», assure Giovanni Fabbri. En Vénétie, Contarina l'effectue auprès des établissements type maternités, maisons de retraite,etc., en porte-à-porte, et a de surcroît implanté des points de collecte.

Reste à développer la collecte sélective en France. A ce stade, l'Hexagone peine encore à la mettre en place pour les déchets organiques et n'est pas sur les radars de Fater.